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  • Photo du rédacteurLouise

Valérie raconte sa fibromyalgie

En 2017, on découvrait avec stupéfaction le quotidien douloureux de la chanteuse Lady Gaga, porteuse de la fibromyalgie, une maladie caractérisée par des douleurs diffuses dans tout le corps, une grande fatigue et des troubles du sommeil, lors de la sortie du film Five Foot Two.

Aujourd'hui, c'est à travers le touchant portrait de Valérie, 52 ans, ma mère, que nous allons en apprendre davantage sur cette maladie dite "invisible" qui touche pourtant beaucoup de femmes (et pas seulement). Mercredi 13 mars, 15h47, elle commence à répondre à mes questions. Pour cela, elle prend son fameux cahier dont elle adore la couverture car il y ai écrit "Lorette est fleuriste à Quimper, mariée à un pompier et poète à ses heures...".Attention, ça commence... Belle lecture à toi !



Qui es tu Valérie?

En fait, je ne m'appelle pas Lorette et même si comme elle, j'aurais aimé être fleuriste ...ou ébéniste ...

Je m'appelle Valérie et je suis éducatrice spécialisée depuis une trentaine d'années. Aujourd'hui je travaille auprès de jeunes gens de 20 ans et plus qui souffrent de polyhandicape. Au cours de ces 30 années, j'ai travaillé également auprès de jeunes en grande difficulté sociale présentant des troubles de la conduite et du comportement, auprès de personnes déficientes mentales. Dès que j'ai obtenu mon DE d'éduc spé , je me suis envolée pour Cotonou au Bénin où j'ai mis en place avec l'aide de collègues Béninois, 2 classes d'intégration dans une école primaire. Cette expérience qui a duré plus d'une année en Afrique de l'Ouest à forgé ma personnalité. Elle m'a aidé à avoir confiance en moi et à avoir une vision plus globale de ma vie. C'est une expérience que je souhaite à tous ceux qui se posent des questions sur la vie, leur vie ! Après tout cela j'ai pu penser à moi ...mon travail...ma vie personnelle. J'ai toujours eu envie de créer une belle et grande famille. Et c'était également le cas pour Michel que j'ai rencontré en 1996. On a décidé tous les 2 de faire un bout de chemin ensembles et en 1999 ...on est devenu une grande famille ! Très grande d'un coup puisque j'ai eu la chance toute naturelle de mettre au monde 3 bébés filles en bonne santé et belles à croquer ! J'ai oublié les moments fatigants et difficiles pour ne garder en mémoire que le bonheur d'être maman de triplées. J'ai recommencé à travailler lorsque mes 3 filles ont eu 4 ans . Et là par contre ,ça à été très difficile physiquement car je travaillais en horaires décalés, et un week-end sur 3 avec une population de jeunes adultes en grande déficience mentale. Rapidement j'ai été très fatiguée ,s'en est suivi un burn out qui m'a obligé à me mettre en arrêt de travail pendant plusieurs mois, assorti d'une béquille chimique pour m'aider à remonter la pente. Notre couple, la grande famille que je vénérais n'a pas résisté à cette tempête. Grâce à un directeur très compréhensif j'ai pu bénéficier d'une convention entre 2 établissements de deux associations différentes . C'est alors que j'ai commencé à travailler auprès d'enfants polyhandicapés à Dirinon dans un institut d'éducation motrice. Aujourd'hui je travaille pour le même directeur, les locaux ont déménagé à Landerneau pour devenir IEM KERDELUNE ,la maison des différences. Ce travail m'a tout de suite plu. Je travaillais de 9h à 17h, ce qui m'a permis d'avoir mes enfants en garde alternée. Je restais tout de même très fatiguée depuis le burn out dont je parlais au dessus. J'ai à nouveau dû me mettre en arrêt et consulter un psychiatre qui m'a proposé une hospitalisation afin de trouver le traitement le plus approprié pour soigner cette nouvelle dépression.


Comment et quand t'es tu rendue compte que tu étais porteuse de cette maladie ?

Au bout de quelques temps, les choses sont revenues dans l'ordre. Psychologiquement, j'allais mieux, je faisais un peu de sport, pas trop je ne suis pas une grande sportive (rires). Cependant, je courais un peu et j'allais faire des longueurs à la piscine ; le médecin s'apprêtait même à diminuer petit à petit mon traitement anti depresseur. Puis, je l'ai consulté pour des maux de dos et surtout des douleurs continues au bras gauche, à partir de l'épaule. Ça semblait être une tendinite. J'ai donc arrêté le sport mais au bout d'une année les douleurs persistaient et s'étendaient à d'autres articulations. J'ai donc été orientée vers un rhumatologue qui avant de poser un diagnostic m'a fait passer plusieurs examens médicaux afin d'écarter toutes les pathologies qui pouvaient présenter les symptômes que j'avais. Ce n'était pas l'arthrite ,ni la sclérose en plaques, ni une maladie des os etc ... Le diagnostique du rhumatologue ne s'est pas fait attendre : syndrome polyalgique idiopathique diffus ! Surprise ! C'est quoi ce syndrome ? Au secours, je cours à la catastrophe ! Ce n'était autre que le nom hyper scientifique de la FIBROMYALGIE. Nous étions le 5 février 2013 ..../...


Et le quotidien avec cette maladie comment ça se passe? Quels sont les symptômes? C'est une maladie qui est souvent dite "invisible". De ce fait, est-ce qu'elle est complètement comprise par ton entourage? Est-ce que tu as eu un soutien dès le départ?

Longtemps, la fibromyalgie a été décrite comme maladie psychosomatique . Ici et là, on entendait facilement " c'est dans la tête " ! C'est en effet une maladie invisible. Elle n'est ni génétique, ni héréditaire. Et selon l'individu qui en souffre , les symptômes peuvent être différents. Globalement c'est une maladie qui provoque des douleurs chronique et diffuses (douleurs articulaires , jambes sans repos, céphalées, intestins irritables ...). Les douleurs articulaires, la fatigue , les troubles du sommeil sont des points centraux de la maladie.

On ne naît pas fibromyalgique, on le devient. Traumatismes, stress, choc émotionnel peuvent être le déclencheur de la maladie. La fatigue est décrite comme rédactionnelle car fluctuante ! Selon l'environnement et les circonstances, cette fatigue peut disparaître, puis réapparaître. Ainsi c'est une pathologie très complexe pour le patient lui même qui a de fait du mal à l'expliquer à son entourage. Pourtant, plus que les béquilles chimiques qui ne calment pas les douleurs que provoquent la fibromyalgie , ce sont les pratiques douces qui aident le patient à "accepter" son état. Bien évidemment, il faut parvenir à faire le deuil de la "vie d'avant ". Parfois les crises de douleurs plus aiguës que d'habitude me laissent penser que je vis dans le corps d'une octogénaire ! Je ne peux plus être active,comme avant. Il est difficile pour moi de faire des projets à long terme ou de prévoir sorties ou autres activités car au moment où je le note sur un agenda je me sens bien (fatiguée et douloureuse certes ...mais ça, on apprend à le gérer ) et lorsque la date arrive d'autres symptômes viennent s'ajouter et ...on est très souvent dans l'obligation de rester au repos et d'annuler le projet ! C'est dans ces situations qu'il est difficile de faire comprendre à notre entourage proche (conjoint, enfants , amis ...) que nous sommes dans l'incapacité d'honorer les choses prévues quelques temps à l'avance ! On apprend à organiser son temps en fonction des possibilités et de l'énergie du moment. La réorganisation de mon travail a été nécessaire dans un premier temps. Certains de mes collègues de travail ne comprenaient pas ! La fybromialgie est invisible , pas mortelle. Elle est invincible car elle ne possède pas pas de traitement curatif. C'est une maladie chronique qui, du fait de son évolution a un impact psychologique , social et familial. La réorganisation de mon travail n'a pas suffit à me permettre d'être assidue. Depuis 5 ans je bénéficie d'une orientation de travailleur handicapé et je suis en invalidité de catégorie 1, c'est à dire que je travaille à mi-temps soit 2 jours par semaine.

A force d'explications, de discussions, d'échanges , au travail, les gens ont compris. Certains se sont renseignés, d'autres connaissent un.proche dans la même situation. Je n'ai aucun mal, aucune gêne à parler de la fibromyalgie et de son côté handicapant dans certaines situations. Avec mes enfants, j'ai beaucoup échangé. J'ai dit la douleur, la fatigue, la gêne que je ressentais au quotidien. Puis j'ai écrit un résumé pour décrire la fibromyalgie avec des mots simples. Chacune a lu cet écrit et c'est devenu plus clair pour elles. Je ne somatise pas ; il y a bien une raison à ces moments de repli sur soi, de repos obligé ... Puis, j'ai rencontré mon compagnon actuel. Le contexte de la rencontre était propice à un bien être, une envie de bien faire, un désir de plaire aussi ! Mais la maladie, elle, était toujours là. Nous avons eu des moments très difficiles. Des moments d'incompréhension, de questionnements. Mon compagnon ne comprenait pas ces hauts et ces bas que provoque la fibromyalgie. Aujourd'hui, après maintes discussions, explications, il comprend.C'est pour lui difficile à accepter mais il comprend et me rappelle parfois à la réalité ...parce que parfois, elle nous laisse tranquille ...et alors, on se sent pousser des ailes ,on a envie de faire pleins de choses. On oublie la douleur, la fatigue. Mais le lendemain, notre corps nous rappelle à l'ordre !

Au départ, il y a maintenant 6 ans ,je me suis sentie très seule. Je finissais par me dire que en effet, c'était dans ma tête. Puis, j'ai pu en échanger avec mes filles, je voulais vraiment qu'elles comprennent. J'avais peur qu'elles soient perturbées. C'est donc avec elles trois que j'ai échangé le plus. Puis en parallèle, je devais aussi expliquer au travail mes absences, mes difficultés à "être comme avant " !


Un mot pour terminer?

Pour terminer, je dirais que lorsque le diagnostique est posé , il est important d'en parler. De tenter d'expliquer .D'être comprise afin de ne pas, petit à petit se couper du monde ,de ne pas se renfermer sur soi-même ; la désocialisation se met très vite en place. Je dois être vigilante et rester toujours connectée au monde qui m'entoure. La vie est belle ! "j'ai vieilli, tu as vieilli, mais tu vois je n'ai pas changé " (Paul-Emile VICTOR "autobiographie ") Il y a des choses invisibles, on sait qu'elles existent mais on ne les vois pas .

Val


Merci à Valérie, ma mère, cette femme très touchante, pour ses confidences, sa grande confiance, son honnêteté et sa joie de vivre inégalable. Merci maman d'être celle que tu es au quotidien <3

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