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  • Photo du rédacteurLouise

Rendez-vous avec Marie

Marie a fêté ses 28 printemps cette année. Année où elle a aussi décidé de reprendre ses études après avoir enchaîné différents jobs entre ses 19 et 27 ans. Et c’est ainsi que j’ai pu croiser sa route. Eh oui ! C’est effectivement sur les bancs de la fac que nous avons tissé des liens. Au cours de longues discussions, de réflexions que nous pouvons avoir, elle m’en apprend beaucoup. C’est pourquoi, aujourd’hui, il était important pour moi de vous présenter ma partenaire de cours. On va parler féminisme, identification ou encore pression sociale. Les ingrédients parfaits d’une entrevue bien cool. Belle lecture à toi qui que tu sois !


Pour toi c’est quoi le féminisme ?

C’est trop laaarge comme question ! En fait c’est large mais pas tant que ça. Des définitions il y en a pleins, on pourrait blablater sur les courants du féminisme pendant des heures. Mais de manière plus générale c’est un combat pour le droit des femmes, pour arriver à une égalité. Et quand je dis femme je parle de toutes les femmes parce que dans la tête des gens quand on dit femme on pense direct à des femmes cisgenre uniquement. Moi mon féminisme il est intersectionnel, c’est à dire que j’inclue dedans les personnes trans, les personnes non-binaires, tout sauf les mecs cisgenre (assigné homme à la naissance). Quelque chose de plus humaniste en fait même, après je suis quand même pas dans le « oui mais on est tous humain, tenons nous tous la main. ». Fin non, ça ne marche pas comme ça, c’est un peu plus vénère que ça. Je suis pas trop dans le féminisme « oui mais les pauvres hommes, oui mais quand même faut les éduquer ». Tout le monde à internet et peut s’éduquer par soi même. On est tous égaux, mais on en a chier, on en chie toujours et à mes yeux le féminisme n’est pas une affaire de mec, ce sont les meufs qui doivent être devant, les mecs peuvent être derrière pour soutenir, on aura besoin d’eux. Après il y a aussi des choses à abolir par rapport à tout ce qu’on impose aux mecs qui découlent du sexisme comme la masculinité toxique : « sois fort ! », « pleure pas ! »… Tout ça, les hommes le subissent. Mais ils subissent pas le sexisme comme les femmes peuvent subir le sexisme. Donc pour moi les hommes peuvent être avec nous, mais c’est aux femmes de s’organiser, de revendiquer des choses…

C’est trop vague ! (rires) Mais je dirais que le féminisme est le combat pour que les femmes soient reconnues au même titre que les hommes et qu’on vive tous dans un monde où l’égalité salariale existe, l’égalité au niveau de la santé aussi, que les femmes ne subissent plus de violences qu’elles soient gynécologiques, sexuelles, psychologiques…


Comment ton féminisme se traduit-il au quotidien ?

J’essaye d’éduquer mon entourage. En commençant à m’intéresser à cela je me suis rendue compte que par exemple, ma mère n’était pas du tout éduquée sur la question. J’en ai beaucoup parlé avec ma sœur, on s’éduque mutuellement… J’ai commencé par ça et internet aussi. Ce n’est que très récemment que j’ai commencé à faire des actions dans la rue par exemple. Mais je me rend compte qu’internet est beaucoup dénigré. On voit souvent les commentaires « bah t’as qu’a aller dans la rue au lieu de rester derrière ton pc ! ». Mais en fait internet éduque, sert à rallier des gens et moi sans internet je sais pas si j’aurais déconstruit autant de truc. Je fais beaucoup de relais d’information, sur des choses qui ne me concernent pas directement aussi..

Puis on va tenter de continuer à faire du terrain. Je suis dans une asso’ féministe de l’université : Les Furies. (https://www.facebook.com/furiesrennes2/) Mais après nous ce qu’on constate, c’est que dès qu’il y a un événement féministe organisé tout le monde s’en fou et je pèse mes mots… Le féminisme a une image de meufs « mal baisées », de meufs « hystériques » donc c’est un peu compliqué de rassembler du monde.


Tu nous parlais d’un combat intersectionnel, est-ce que par rapport à cela, tu pourrais nous dire comment tu t’identifies ?

Disons que moi j’ai mis du temps. Le féminisme à 15 ans ça ne m’ intéressait pas, je ne m’étais pas du tout renseigner sur la question. Puis j’ai commencé à lire des meufs qui parlaient sur internet de ce qu’était le genre et toutes les problématiques autour du genre. Toute notre vie tourne autour du genre en fait, on s’identifie et on est identifié en permanence par les autres. Par exemple on entre dans une boutique, on nous dit « bonjour madame ! » ou « bonjour monsieur! ».Il n’y a pas d’alternatives en fait. Déjà il n’y a pas d’entre-deux, ça n’existe pas dans notre société, pas en france en tout cas et c’est bien dommage. En fait quand on naît, on s’en fiche d’être une fille ou un garçon en fait. On est juste des enfants et c’est en grandissant que toute notre vie est fondée sur le « toi t’es une fille donc tu fais ça ». Il n’y a pas d’entre-deux, on ne te dit pas « au pire tu verras en grandissant ce que tu veux être ». Il n’y a pas de demi mesure, c’est vraiment très extrême même si on voit que ces derniers temps ça commence à bouger. Mais encore l’autre jour, il y a un gars dans un lycée que s’est fait expulser parce qu’il portait du maquillage...

Du coup moi j’ai mis du temps à déconstruire tout le truc et à me dire dire peut-être que moi en fait je porte ça parce qu’on m’a tellement dit que les filles elles portent ça et du coup c’est pour ça que je le porte. Du coup je m’interdit de faire d’autres trucs parce qu’on me dit que c’est des trucs de mecs… Et une fois que j’ai fait cette déconstruction, d’autres questions sont venues, « est-ce que je suis bien une meuf ? », « est ce que je me sens meuf ? » ou « est-ce que je suis un mec ?; « est-ce que j’en ai quelque chose à faire ? ». En fait, pendant un temps, moi j’en avais quelque chose à faire, j’avais besoin de savoir. Mais c’est un truc super long, faut pas croire, les gens ne se réveillent pas en se disant « C’est bon je sais ! » (rires). Il y a des gens qui le savent extrêmement tôt mais ça reste assez exceptionnel. C’est tellement ancré, construit, il faut se poser pleins pleins de questions puis une fois qu’on a fait la grosse introspection on se dit « Bon » soit on pose des étiquettes parce que ça fait du bien parfois de poser des étiquettes, se dire qu’on est pas seul, soit on s’en fiche. Personnellement, la actuellement c’est mon cas ! Ca ne veut pas dire que dans 10 ans ce sera toujours le cas en fait et c’est un truc que j’aurais aimé qu’on me dise à 16 ans quand j’ai su que je n’étais pas hétéro, quand j’ai su que j’étais un peu en marge, « chelou » ou « garçon manqué », ou encore des périodes où je portais des jupes, beaucoup de maquillage, de la lingerie fine. Aujourd’hui, je ne met pas de jupe et en fait j’aurais aimé qu’on me dise « c’est pas grave », c’est pas grave, pendant 6 mois de l’année d’avoir envie de mettre du maquillage et pendant deux ans de plus du tout avoir envie d’en mettre et puis deux ans plus tard recommencer à en mettre, ce n’est pas ça qui te définit en fait.

Je n’ai rien contre les étiquettes, juste au niveau du genre je n’en met pas trop, j’ai essayé d’en mettre une puis au final non… Ca ne définit pas ma vie après je comprends très bien que certaines personnes en ai besoin, c’est vital pour eux de savoir qu’ils sont légitimes à ressentir ce qu’ils ressentent. Je me dis dans 5 ans peut-être que je mettrais une étiquette pour le moment, je m’en fiche qu’on me considère comme une meuf mais j’avoue que des fois ça me fait chier et j’aimerais bien des fois entrer dans une boutique sans qu’on me dise « Bonjour MADAME ! » ou « Bonjour MONSIEUR » parce que suivant comment je suis fringuée ça change. C’est pour ça que je me définie pas vraiment en un mot mais on va dire QUEER (terme englobant tous les genre qui permet de reconnaître une différence sans avoir à se définir de façon rigide par une étiquette notamment) pour conclure, parce que sinon ça va être trop long ! (rires)


Te sens tu soumise à une certaine pression sociale dans le monde dans lequel nous vivons ?

Oui, après c’est assez personnel je pense parce que c’est aussi dû à notre entourage. Après la pression, genre la pub, une fois qu’on commence à déconstruire et qu’on se rend compte de la connerie, on passe au dessus. Après de faire des déconstructions ce n’est pas donné à tout le monde, il faut déjà avoir la possibilité de le faire. Moi j’étais dans un certain contexte qui faisait que j’avais internet, j’avais les réseaux sociaux. Tout le monde n’a pas internet. J’avais du temps, j’étais au chômage. (rires) J’avais la possibilité de le faire, c’est déjà en soit un privilège.

Après des pressions sociales...Le mariage plus trop, je dirais. C’est quand même quelque chose qui est moins prenant, moins fort. La pression des gosses je ne la ressens pas vis à vis de mon entourage mais par contre je le ressens sur tout le reste. J’ai 28 ans, et j’arrive à un âge où j’ai peur d’aller à un entretien d’embauche et qu’on me demande si je vais avoir des gosses alors que je n’en veux pas. Donc clairement ce sera pas un problème mais ce genre de question m’énerverait tellement lors de l’entretien d’embauche. J’ai l’impression que cette pression là je ne peux pas y échapper, il y aura toujours un moment où on va me rappeler que j’ai un utérus donc je peux porter un enfant, faut que ça serve quoi… J’ai l’impression qu’on va finir par me ramener à ça et me dire « Bah alors c’est pour quand ? », en plus j’ai pleins de potes qui ont ou attendent des enfants .

Après, des fois j’ai l’impression que ça dérange les gens de pas réussir à m’identifier tout de suite dans la façon dont je suis fringuée. De se dire c’est une meuf ? C’est un mec ? On sait pas… Ça c’est peut-être dans ma tête mais les gens doivent se dire « alors ça c’est une meuf lesbienne ! ». Je ne sais pas si c’est une pression mais ça me gêne, après il y a des moment où ça me fait vraiment rire, ils regardent toujours dans un le même ordre « ma tête puis ma poitrine ». (rires) C’est un peu une pression quand même car si tout le monde s’en fichait je pense que je m’en ficherait encore plus d’être une meuf ou d’être un mec, d’être juste Marie quoi.

Mais oui je dirais que la pression la plus importante que je ressens c’est celle des enfants, parce qu’on va nous dire un moment « il est l’heure », parce que nous contrairement aux hommes on va être périmées à un moment. (rires)


Un mot de la fin ?

Si vous êtes intéressés par le féminisme, allez vers le féminisme intersectionnel, parce que le féminisme est soit intersectionnel soit pas! Je crois que ce qui me rend le plus triste c’est de voir des gens qui se battent pour la même base et qui finalement ont des visions des choses très différentes, on l’a vu très récemment avec des femmes qui portent le voile que ça faisait débat chez certains groupes féministes alors que ce débat ne devrait même pas exister, on a pas à dicter sa conduite à qui que ce soit, chacun fait ce qui veut, le voile ne fait de mal à personne du moment qu’il est choisi. Le travail du sexe, un autre débat qui ne devrait pas avoir lieu. Et je crois que c’est ce qui me fait le plus mal, c’est de voir des gens qui perdent leur énergie à se battre contre des choses qui devraient converger, qui n’ont pas lieu d’être. Je vois comment les meufs trans sont complètement écartées parfois du féminisme, comment le simple fait de la non-binarité peut être complètement exclu. Il y a tellement de courants que des fois ils convergent pas du tout. Il y a des personnes qui se détournent du féminisme et du combat féministe parce qu’elles se sentent pas du tout représentées, et ça me rend triste parce que je me dis que c’est des personnes qui auraient pu se battre avec nous, apporter des idées et qui le font pas car elles sont complètement refroidies par l’ambiance, les propos de certaines personnes.



Merci à Marie pour sa confiance !

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